Performeuse et artiste multimédia états-unienne.
L’œuvre et la vie d’Ana Mendieta sont inextricablement liées. Afin de la protéger des tracas que le régime castriste faisait peser sur ses parents, à l’âge de 12 ans, elle est envoyée avec sa sœur aux États-Unis, où elle obtient ses diplômes de peinture, multimédia et art vidéo à l’université de l’Iowa, lieu de ses premières performances entre 1972 et 1974, qui portent toutes les stigmates de ce déchirement familial et culturel. Ainsi, dans Death of a Chicken (« Mort d’un poulet », 1972), l’artiste, nue, tient par les pattes, le poulet décapité qui, soumis aux soubresauts de son agonie, macule de sang la virginité de son plumage et éclabousse le corps de l’officiante. Ce rituel fait explicitement référence aux sacrifices d’animaux de la culture latino-américaine, en même temps qu’il souligne l’identification de la femme artiste au monde animal et à la nature. Cet usage du sang est récurrent dans la démarche d’A. Mendieta, particulièrement dans sa performance la plus célèbre (Body Tracks, « Traces du corps », 1974), où, face à un mur, les mains levées enduites de peinture rouge, elle se laisse glisser jusqu’à terre, laissant sur la paroi la trace de son mouvement. Après sa mort tragique en 1985 (elle s’est défenestrée dans des conditions obscures, aggravées par le rôle ambigu de son mari, le plasticien Carl Andre), Nancy Spero transforme cette action en emblème politique et esthétique.Ana Mendieta meurt le 8 septembre 1985 à New York après une chute par la fenêtre de son appartement situé au 34e étage au 300 Mercer Street à Greenwich Village, où elle vit avec son mari, le sculpteur minimaliste Carl Andre, avec qui elle est mariée depuis huit mois.
Juste avant sa mort, les voisins ont entendu le couple se disputer violemment. Ils n'étaient pas témoins oculaires des événements qui entraînèrent la mort de Mendieta8. Dans un enregistrement de l'appel d'Andre aux secours on l'entend dire :
« Ma femme est une artiste, et je suis un artiste, et nous avons eu une dispute à propos du fait que je sois plus, euh, exposé au public qu'elle. Et elle est allée dans la chambre, et je l'ai suivie et elle est passée par la fenêtre. »
En 1988, Andre est accusé de meurtre puis acquitté. Après trois ans de procédures judiciaires, son avocat décrit la mort de Mendieta comme un possible accident ou un suicide. Le juge déclare que « la culpabilité n'a pas été prouvée, au-delà d'un doute raisonnable. »
L'acquittement provoque un tollé parmi les féministes du milieu de l'art et reste toujours controversé. En 2010, un colloque intitulé « Where is Ana Mendieta » se tient à l'université de New York pour célébrer le 25e anniversaire de sa mort11. En mai 2014, le groupe de protestation féministe No Wave Performance Task manifeste devant la rétrospective de Carl Andre à la Dia Art Foundation12. Il dépose des piles de sang animal et de boyaux devant l’établissement, tout en distribuant des survêtements transparent où il était écrit « J'aimerais qu'Ana Mendieta soit toujours en vie. » En mars 2015, le No Wave Performance Task et un groupe de poètes féministes originaires de New York se rendent à Beacon pour protester contre la rétrospective d'Andre à la Dia:Beacon. Dans la galerie principale, elles hurlent, fabriquent des « siluetas » sur le sol du musée avec de la neige, teintée avec du paprika, des sprinkles et du faux sang.